Marianne du Vin
C'est la tradition familiale qui marque ici l'attachement au terroir, donc aux valeurs de l'AOC. Heureux successeur d'une belle lignée de vignerons pétris de ce que la viticulture bourgueilloise porte en elle de principes professionnels et d'éthique agricole, Philippe Boucard s'est toujours battu pour l'honneur de la paysannerie française. Sa dévotion à la cause bachique et son engagement au service de l'AOC Bourgueil, notamment au travers de responsabilités officielles, n'ont d'égal que la rigueur et la justesse de ses vins. Vins de la mémoire avec les sublimes Bourgueils 1921,1934,1947 ou 1959 de ses aïeux, bien supérieurs à certains grands crus classés du Bordelais auxquels on peut oser les comparer, et vins du temps présent, toujours fidèles à la maxime de l'oenologue Jacques Puisais, par ailleurs président d'honneur des Mariannes du vin, selon qui «un vin juste doit avoir la gueule de l'endroit et de l'année où il est né et les tripes de celui qui l'a fait». Une formule inscrite dans la tête des Boucard, transmise de génération en génération depuis l'arrière-grand-père Lamé, que l'on retrouve à chaque millésime dans les vins des Chesnaies, propriété de cette famille depuis 1889. D'instinct, on produit ici du Bourgueil qui ne ressemble qu'à du Bourgueil, en prenant soin de préserver les nuances des villages de cette appellation, de Saint- Patrice à Restigné et d'Ingrandes-de-Touraine à Benais, où le cépage Cabernet Franc réalise des prouesses. Nous avons eu un coup de coeur pour la cuvée «Prestige» 2006, ample, pleine, charnue, aux tanins arrondis et longs en bouche, vin tout en finesse bien représentatif du style de ces vignobles loués par Ronsard aussi bien que par Rabelais. Un flacon prometteur qui donne la dimension de la noblesse des vins de Loire lorsqu'ils sont grands. Offrant déjà ses atouts de jeunesse, ce flacon, dont on se régalera encore dans vingt ans, répond à tous les défis de la grande cuisine mais se tient comme un prince sur une volaille bien née ou une entrecôte persillée de gras.
Marianne 08/07/2009 - Eric Conan et Périco Légasse